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Impacts de la réforme Bâle IV au travers de 3 textes (CRR3, CRD VI et BRRD3)

Karima AKAMKOUM, le 01/08/2022

1. Contexte

Les accords de Bâle IV sont un complément de réformes pour un nombre d’exigences déjà adoptées, ou encore la finalisation de Bâle III. C’est la transposition en droit européen du texte de Bâle paru en décembre 2017 «Basel III: Finalising post-crisis reforms». Cette réforme avait pour but de limiter la réduction des exigences en fonds propres liée à l’utilisation des modèles internes et de rationaliser les méthodes standards de calcul des exigences en fonds propres.

La transposition des accords de Bâle IV au travers de 3 textes (CRR3, CRD VI et BRRD3) a été publiée au journal officiel de l’Union européenne (JOUE) le 27 octobre 2021 et poursuit trois objectifs :

  • Améliorer qualitativement les méthodes de calcul et introduire des standards pour un système bancaire plus résilient, afin de soutenir l’économie dans le contexte de la reprise après la crise COVID-19 et renforcer la solidité financière des institutions établies dans l’UE. Cette réforme cherche à renforcer le dispositif de fonds propres fondé sur le risque, sans augmentation significative des exigences de fonds propres. Les critères de proportionnalité font partie intégrante de l’analyse d’impact accompagnant le CRR3/CRDVI.
  • Renforcer encore davantage l’harmonisation des pouvoirs de surveillance, notamment en ce qui concerne le caractère «fit and proper» des dirigeants ou encore par l’introduction de nouvelles règles de régulation et supervision des succursales de pays tiers.
  • Introduire des règles explicites de management et de supervision des risques ESG (environmental, social and gouvernance), notamment en imposant des stress tests sur les risques climatiques.

Les éléments de cette réforme sont énumérés comme suit :

2. Le règlement CRR3

Le règlement CRR3 complète le règlement CRR2 publié en 2019 et modifie le règlement CRR en ce qui concerne le risque de crédit, le risque CVA, le risque opérationnel, le risque de marché et l’Output Floor (la mesure phare du nouveau règlement CRR3).

Le règlement CRR3 entrera en application pour la plupart de ses dispositions le 1er janvier 2025.

La Commission européenne estime que le règlement CRR3 devrait entraîner une hausse des besoins en capital de l’ordre de 6.4% à 8.4% en moyenne pour les banques de l’Union européenne à long terme après une période de transition qui cesserait à la fin 2029. De plus, en fonction de la structure de leurs portefeuilles et de la nature de leurs risques, certaines activités comme le leasing, les financements immobiliers (y compris l’immobilier résidentiel), la banque d’investissement ou encore le financements aux grandes entreprises, seraient plus impactées que d’autres.

3. La directive CRD VI

La directive CRD VI complète la directive CRD V parue en 2019 en introduisant quelques modifications en ce qui concerne les pouvoirs surveillance, les sanctions, les succursales de pays tiers et les risques ESG (environnementale, sociale et de gouvernance).

Les principales modifications proposées par la directive CRD VI sont les suivantes :

3.1 Pouvoirs de surveillance

L’Union bancaire repose sur la convergence des pratiques de surveillance et sur un degré suffisant d’harmonisation des différentes règles nationales encadrant les mesures prudentielles. Cependant, un certain nombre de divergences entre les États membres sont, à cet égard, considérées comme très préjudiciables au bon fonctionnement de l’Union bancaire. C’est notamment le cas des pouvoirs de surveillance.

Pour remédier à cette situation, la directive CRD (Capital Requirements Directive) a élargi la liste des pouvoirs de surveillance dont peuvent disposer les autorités européennes compétentes pour couvrir des opérations telles que acquisitions de holding (supérieure à 15% du capital éligible de l’acquéreur), aux transferts d’actifs ou de passifs ou encore aux fusions et divisions, si ces opérations sont matérielles.

3.2 Le cadre « fit & proper »

Le cadre des dispositions « fit & proper » qui s’applique aux dirigeants des établissements de crédit est renforcé pour clarifier les rôles respectifs des banques et des autorités de surveillance dans la validation des membres du conseil d’administration et des détenteurs de fonctions clés, conformément aux orientations de l’EBA.

3.3 Risques ESG

De nouvelles dispositions sont introduites et des adaptations sont apportées à plusieurs articles de la CRD et du CRR afin de faire face aux risques significatifs auxquels les établissements de crédit seront confrontés en raison du changement climatique ainsi qu’aux profondes transformations économiques nécessaires pour gérer ces risques et les autres risques ESG.

La CRD VI a introduit de nouvelles règles qui requièrent des établissement de crédit l’intégration des risques ESG à court, moyen et long terme à la fois dans leurs stratégies, dans leurs processus d’évaluation des besoins internes en fonds propres et dans leur gouvernance interne.

L’Autorité bancaire européenne (ABE) est habilitée à émettre des orientations concernant l’intégration uniforme des risques ESG dans l’exercice SREP et le développement de standards pour la méthodologie des stress tests appliqués à ces risques.

3.4 Les succursales de pays tiers (Third-Country Branches, TCB)

La Commission propose un cadre de surveillance prudentielle exhaustif et proportionné applicable aux TCB. Ce cadre apporterait la clarté, la prévisibilité et la transparence nécessaires aux entreprises de pays tiers qui souhaitent fournir des services bancaires par l’intermédiaire de succursales dans un ou plusieurs États membres. Le titre VI de la CRD est donc modifié pour inclure des dispositions sur les points suivants :

  • La demande d’agrément qui devient obligatoire.
  • L’obligation de se conformer à des exigences de capitalisation, de liquidité, de gouvernance interne, de contrôle des risques, de reporting et de supervision.
  • Pour des raisons de proportionnalité, le champ d’application et le niveau des exigences prudentielles sont modulés de manière à différencier les deux catégories des TBC :
    • Catégorie 1 : inclut les TCB dans au moins l’une de ces situations:
      • Les TCB dont les actifs sont égaux ou supérieurs à 5 Mds€,
      • Les TCB autorisées à recevoir les dépôts des particuliers
      • Les TBC considérées comme «non éligibles»
    • Catégorie 2 : inclut toutes les TCB qui ne sont pas classées dans la catégorie 1.
  • Les TCB systémiques dont les actifs dépassent 30 Mds devront notamment se transformer en filiales.

3.5 Révision du régime des sanctions

La CRD est modifiée pour modifier le régime des sanctions, notamment la liste des infractions passibles de pénalités et de sanctions administratives. Cette liste a été complétée par des exigences prudentielles actuellement absentes de la liste des infractions sanctionnables.

3.6 Examen de la composition des exigences au titre du pilier 2

Les autorités de surveillance ont la possibilité de décider, au cas par cas, d’imposer des exigences de fonds propres au titre du pilier 2 avec une part plus élevée de CET1 ou de Tier1. Ce nouveau traitement n’a été appliqué que récemment lors de la crise de la COVID-19.

3.7 Corrections accompagnant l’introduction du plancher de fonds propres

Le CRR3 a introduit l’Output Floor dans le calcul du montant total d’exposition au risque. Cependant, deux de ces exigences, à savoir la P2R (l’exigence propre à l’établissement au titre du pilier 2) et le SyRB (l’exigence de coussin pour le risque systémique), peuvent être utilisées pour traiter des risques qui sont de nature similaire à ceux traités par l’Output Floor.

Par conséquent, l’ABE recommande de geler ces deux paramètres pour les établissements lorsque l’Output Floor commencera à s’appliquer afin de ne pas générer de double comptage.

3.8 Informations à fournir

Les États membres peuvent permettre aux autorités de surveillance d’exiger des établissements qu’ils soumettent toutes les informations de type Pilier 3 à l’ABE dans un délai déterminé. En outre, les autorités de surveillance peuvent autoriser les établissements à utiliser des médias et lieux de publication spécifiques autres que le site web de l’ABE. Ceci est conforme à la proposition de modification du CRR selon laquelle, en plus de la publication centralisée de l’ABE, les établissements restent libres de publier leurs propres informations par d’autres moyens.

3. La directive BRRD3

La directive BRRD3 complète la Directive BRRD2. Les principales recommandations sont résumées ci-dessous :

  • Traitement spécifique pour la souscription indirecte d’instruments éligibles aux fins de la MREL afin de remédier aux incohérences constatées entre le règlement CRR et la directive relative au redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances BRRD.
  • Prise en considération des filiales établies en dehors de l’UE afin d’aligner le traitement prévu par le CRR pour les filiales d’établissements de pays tiers sur celui décrit dans la norme TLAC correspondante, qui s’applique aux entités établies dans toute juridiction du CSF (Conseil de stabilité financière).
  • Modification du CRR pour préciser dans quelle mesure les autorités de résolution peuvent remédier aux éventuelles incohérences entre la somme des exigences effectives de TLAC de chaque entité de résolution d’un groupe d’établissements d’importance systémique (G-SIIs) doté d’une stratégie de résolution à points d’entrée multiples ET l’exigence théorique de point d’entrée unique de ce groupe de G-SIIs.
  • Déductions appliquées aux éléments d’engagements éligibles : exigences de fonds propres et d’engagements éligibles pour les établissements qui sont des filiales importantes de G-SIIs avec une stratégie de résolution à points d’entrée multiples.
  • Le calcul de l’excédent TLAC/MREL d’une filiale dans le cadre du régime général de déduction applicable aux G-SIIs avec une stratégie de résolution à points d’entrée multiples, devrait tenir compte à la fois des exigences TLAC/MREL de la filiale qui sont fondées sur les risques et de celles qui ne le sont pas, conformément à la norme TLAC. Cela permettrait d’éviter que l’excédent TLAC/MREL d’une filiale donnée soit surestimé.

4. Références

https://ec.europa.eu/info/publications/211027-banking-package_en

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